Accueillir ce qui advient

Analysez cette image générée par IA, pour identifier des éléments qui se trouvent dans l'extrait ci-dessous. Quelle interprétation pouvez-vous en faire ?

Extrait :

VII.

Que dans une navigation le vaisseau qui te porte prenne terre, si tu descends puiser de l’eau, tu peux, en passant, ramasser quelque coquillage ou quelque plante ; mais tu dois toujours penser à ton vaisseau et détourner à chaque instant la tête de son côté, cherchant si le patron ne t’appelle pas. Et s’il t’appelle, tu dois laisser là tout ce que tu avais ramassé, de peur qu’on ne te lie et qu’on ne te jette dans le vaisseau comme du bétail. Ainsi, dans la vie, si, en guise de plante ou de coquillage, une femme ou un enfant te sont donnés, prends-les ; mais si le maître du navire t’appelle, cours vite à lui, laisse là tout et ne regarde pas derrière toi. Si tu es vieux, ne va pas trop t’éloigner, de peur de manquer à l’appel.

VIII.

Ne demande jamais que les choses soient comme tu les veux ; tâche de les vouloir comme elles sont, et sans peine tu couleras ta vie.

ÉPICTÈTE, Manuel, tr. H. Joly, Librairie Delain, 1901.

Question : 

1. Le propos se fait ici non seulement image, mais parabole. 

a) Le matelot est-il maître du navire qui le transporte, de ses escales, de ses destinations, de sa navigation ?

b) À l'occasion d'une escale, il peut bien chercher, au gré de ce qu'il rencontre, à cueillir ce qui se présente. Cependant, à quoi doit-il dans le même temps veiller,et qui est supérieur à cette cueillette de circonstance ?

c) Pourquoi le matelot doit-il tout abandonner, dès lors que son capitaine le rappelle ?

d) Selon vous, la liberté du matelot ne se manifeste-t-elle que dans le moment où il explore ce qu'il peut trouver, sans autre limite que celles de ce que la nature lui offre ?

e) Pourquoi différencier ce que la nature présente, et ce que les hiérarchies humaines établissent ? Dans les deux cas, le matelot n'a-t-il pas également affaire à quelque chose qui ne dépend pas de lui ?

2. Interprétons la parabole : si le capitaine de nos existences est une volonté divine, avons-nous prise sur elle ? De ce fait, en quoi consiste alors la sagesse ?

3. Épictète dispense alors l'enseignement suivant : "Si tu es vieux, ne va pas trop t’éloigner, de peur de manquer à l’appel." Pensez-vous qu'il puisse en aller autrement pour celui qui est jeune, dès lors que la mort l'appelle ? Pourquoi alors, ici, mentionner seulement la vieillesse ?

4. Expliquez : "Ne demande jamais que les choses soient comme tu les veux ; tâche de les vouloir comme elles sont."

a) S'agit-il, pour ne jamais souffrir, de n'aspirer à rien ?

b) Notre volonté peut-elle commander à l'ordre du monde ?

c) N'y a-t-il pas cependant des situations, nombreuses, où il est en notre pouvoir de changer le monde parce que nous y appliquons notre volonté ? Le paysan qui laboure son champ, afin de cultiver une terre qui n'est pas d'abord cultivable, se contente-t-il de vouloir les choses "comme elles sont" ? Pourquoi cet exemple n'illustre-t-il pas l'idée précise du texte ici ?

Réflexion : 

Arrivés à ce point de la lecture du Manuel, interrogeons ses enseignements.
Soit, chercher à agir sur ce qui ne dépend pas de nous nous condamnerait à la souffrance.
Soit, les représentations que nous nous faisons participent plus de notre malheur que les faits auxquels ces mêmes représentations sont liées.

1. Pour autant, travailler à un détachement tel que nous arrivions à tout accueillir sans affect, et ne cherchions pas à modifier l'ordre des choses, n'est-ce pas là une sagesse d'esclave des circonstances ? 

2. L'acceptation du sage n'est-elle pas une forme de résignation à ce qu'il serait aussi en son pouvoir de changer, d'influer du moins ? Si nous ne commandons pas aux tempêtes, ne pouvons-nous cependant pas en limiter les effets destructeurs en évitant de bâtir en bord de mer par exemple ?